Une nouvelle crise au Proche-Orient
Le
retour
de
la
République
en
France
avait
été
d'autant
plus
mal
vu
par
les
grandes
puissances
européennes
que
la
révolution
de
1848
avait
comme
nous
venons
de
le
voir
déclenché
des
mouvements
insurrectionnels
en
divers
points
du
continent,
et
c'est
donc
avec
soulagement
qu'elles
accueillirent
le
retour
à
l'ordre
institué
par
le
coup
d'Etat.
Seule
l'Angleterre
resta
méfiante,
attendant
de
voir
les
conséquences
du
retour
au
pouvoir
d'un
Bonaparte.
Mais
tout
fut
remis
en
question
lors
de
la
proclamation
de
l'Empire.
Bien
que
Napoléon
III
ait
affirmé
"l'Empire
c'est
la
paix"
(1),
tous
craignaient
en
effet
que
le
neveu
suive
l'exemple
de
son
illustre
parent
et
que
l'Europe
soit
à
nouveau
déchirée
par des luttes sanguinaires, aussi la France se trouva-t-elle complètement isolée.
Comme
son
oncle,
le
nouvel
Empereur
avait
pour
ambition
d'accroître
la
puissance
et
le
prestige
de
la
France,
mais
par
d'autres
moyens.
En
Europe
il
ne
rêvait
pas
de
conquêtes
territoriales
mais,
estimant
que
le
meilleur
moyen
de
conserver
la
paix
sur
le
continent
consistait
à
mettre
fin
au
morcellement
des
Etats
(Allemagne
et
Italie
en
particulier)
imposé
par
le
Congrès
de
Vienne
et
à
donner
satisfaction
aux
peuples
qui
aspiraient
à
plus
de
libéralisme,
il
entendait
contribuer
à
mettre
fin
à
l'immobilisme
des
puissances
de
l'est
qui
se
voulaient
gardiennes
de
l'ordre
établi.
Par
contre
son
règne
sera
une
longue
suite
d'expéditions
lointaines
visant
à
accroître
le
rayonnement
de
notre
pays
dans
le
reste
du
monde.
D'autre
part
il
vouait
une
grande
admiration
pour
la
puissance
économique,
industrielle,
et
maritime
de
l'Angleterre,
aussi
le
remarquable
développement
que
connaîtra
notre
pays
sous
son
règne
sera-t-il
largement
inspiré
du
modèle
britannique.
Et
comme
pour
parler
d'égal
à
égal
avec
ce
pays
et
mener
à
bien
sa
politique
extra-européenne
il
lui
fallait
disposer
d'une
puissante
Marine,
notre
flotte
connaîtra
alors une ère de prospérité rarement atteinte au cours de son histoire.
Paradoxalement,
alors
que
la
crise
d'Orient
de
1840
avait
failli
amener
nos
deux
pays
au
bord
de
la
guerre,
c'est
une
nouvelle
crise
survenue
dans
cette
région
du
monde
qui
allait
provoquer
un
rapprochement
de
la
France
et
de
la
Grande
Bretagne.
Tout
avait
commencé
par
une
escarmouche
opposant
la
France
et
la
Russie.
Les
firmans
de
1690
confirmés
par
ceux
de
1740
avaient
accordé
à
notre
pays
la
protection
les
chrétiens
vivant
dans
l'Empire
Ottoman,
et
ceux-ci
avaient
alors
acquis
le
droit
d'assurer
la
garde
d'un
certain
nombre
de
Lieux
Saints.
Or
au
fil
des
temps
les
orthodoxes
qui
bénéficiaient
de
la
protection
du
tsar
s'imposèrent
peu
à
peu
dans
la
région,
et
en
1808
ils
avaient
chassé
les
latins des Lieux Saints.
Soucieux
cette
fois
encore
de
satisfaire
son
électorat
catholique,
Louis
Napoléon
intervint
auprès
de
la
Sublime
Porte
dès
son
élection
à
la
présidence
de
la
République,
et
en
février
1852
un
nouveau
firman
rétablit
les
prérogatives
des
catholiques
romains.
Furieux,
le
tsar
Nicolas
1er
obtint
des
Turcs
que
ce
firman
ne
soit
pas
appliqué.
Ayant
appris
que
les
chrétiens
s'étaient
vu
refuser
l'accès
aux
Lieux
Saints
contrairement
aux
accords
conclus,
Bonaparte
réitéra
ses
protestations,
et
Constantinople
s'inclina.
Mais
Nicolas
1er
ne
se
tint
pas
pour
battu,
et
il
envoya
le
prince
Menchikov
en
Turquie
pour
régler
la
question.
Des
négociations
s'ouvrirent,
mais
devant
la
détermination
russe
la
France
joua
la
conciliation,
et
l'affaire
fut
conclue
par
un
firman
de
mai
1853
qui
donnait
satisfaction
aux
deux
parties,
mais
qui
était
particulièrement
favorable
pour
les
orthodoxes.
Ce
qui
mit
le
feu
aux
poudres
fut
une
nouvelle
exigence
des
Russes
qui
tentèrent
ensuite
d'obtenir
un
droit
de
protection sur les 12 millions d'orthodoxes habitant ce pays.
Cette
immixtion
dans
les
affaires
intérieures
de
la
Turquie
était
inacceptable
pour
la
Grande
Bretagne
qui
estimait
que
l'intégrité
de
ce
pays
était
un
élément
essentiel
de
l'équilibre
européen
et
qui
voulait
conserver
sa
suprématie
sur
cette
partie
de
la
Méditerranée
dans
laquelle
elle
avait
des
intérêts
économiques
et
par
laquelle
passait
l'une
des
routes
menant
aux
Indes.
Déjà
en
janvier
de
la
même
année
le
tsar
Nicolas
1er
qui
souhaitait
s'affranchir
des
contraintes
qui
lui
avaient
été
imposées
par
le
traité
de
1841
avait
proposé
aux
Britanniques
d'anticiper
le
démembrement
de
l'Empire
Ottoman
alors
déliquescent
en
le
partageant
entre
les
signataires
du
traité
de
1841.
L'Angleterre
avait
alors
décliné
cette
proposition
et,
mise
au
courant
de
cette
nouvelle
tentative
d'immixtion
dans
les
affaires
turques,
elle
incita
les
Ottomans
à
repousser
les
exigences des Russes. Furieux, Nicolas 1er massa alors ses troupes sur la frontière, menaçant les provinces danubiennes.
Napoléon
III
qui
avait
lui
aussi
des
intérêts
à
défendre
dans
cette
région
vitale
dans
ces
évènements
un
moyen
de
rompre
l'isolement
dont
souffrait
notre
pays.
Faisant
valoir
qu'en
cas
de
conflit
l'Armée
anglaise
ne
pourrait
à
elle
seule
affronter
l'Armée
russe,
il
proposa
alors
aux
Britanniques
une
alliance
qui
fut
chaudement
accueillie
par
ces
derniers,
et
dans
l'espoir
qu'une
démonstration
de
force
suffirait
à
régler
le
problème
une
flotte
franco-britannique
composée
de
quinze
vaisseaux
(dont
huit
français),
douze
frégates
(dont
quatre
françaises),
et
quelques
unités
légères
se
concentra
le
14
juin
à
Besika
à
l'entrée
des
Dardanelles.
Mais
la
réaction
de
Nicolas
1er
fut
d'ordonner
le
3
juillet
à
ses
troupes
d'envahir les Principautés danubiennes.
Toute
conciliation
s'étant
avérée
impossible,
la
Sublime
Porte
déclara
la
guerre
à
la
Russie
le
23
octobre.
La
veille
les
premiers
navires
alliés
étaient
entrés
dans
la
mer
de
Marmara,
rejoignant
la
flotte
turque
qui
protégeait
Constantinople.
Lors
de
ce
transfert,
en
raison
du
fort
courant
et
des
vents
contraires,
les
voiliers
se
montrèrent
dans
un
premier
temps
incapables
de
pénétrer
dans
les
Détroits
sans
l'aide
des
remorqueurs,
et
le
Napoléon
se
distingua
en
se
montrant
capable
de
remorquer
à
lui
seul
le
trois-ponts
Ville
de
Paris
qui
portait
le
pavillon
de
l'amiral
commandant
la
flotte
française
alors
que,
ne
disposant
pas
de
remorqueur
assez
puissant,
son
homologue
anglais
devait
rester
à
l'ancre
dans
l'attente de conditions favorables pendant près d'une semaine avant de pouvoir le rejoindre.
Le
premier
acte
de
ce
conflit
fut
une
bataille
navale
qui
devait
faire
date
dans
l'histoire.
Un
détachement
turc
composé
de
sept
frégates,
trois
corvettes,
et
deux
vapeurs
qui
avait
été
envoyé
en
mer
Noire
pour
ravitailler
des
troupes
stationnées
en
Asie
Mineure
ayant
dû
se
réfugier
à
Sinope
en
raison
du
mauvais
temps,
il
fut
attaqué
le
30
novembre
par
une
flotte
russe
composée
de
six
vaisseaux
dont
trois
trois-ponts,
deux
frégates,
et
deux
vapeurs,
et
en
deux
heures
la
formation
turque
fut
anéantie.
Les
Russes
jouissaient
certes
d'une
supériorité
considérable,
mais
leur
succès
fut
attribué
principalement
au
fait
que,
contrairement
à
ceux
des
Turcs,
leurs
navires
étaient
équipés
d'obusiers.
Déjà
en
1849,
lors
d'une
guerre
opposant
l'Allemagne
au
Danemark
un
vaisseau
danois
et
une
frégate
avaient
été
coulés
par
les
obusiers
qui
protégeaient
la
ville
d'Eckernförde,
mais
ces
pertes
avaient
été
attribuées
à
des
erreurs
commises
par
les
responsables
de
cette
opération.
L'ampleur
du
désastre
subi
à
Sinope
joua
le
rôle
de
révélateur
et
amena
l'ensemble
des
nations
maritimes
à
admettre
enfin
ce
que
Paixhans
avait
prévu
au
début des années 1820, à savoir qu'en raison du pouvoir destructeur des obus l'ère des escadres composées de navires en bois était terminée.
Le
3
janvier
1854
les
dix-huit
bâtiments
constituant
la
flotte
alliée
reçurent
l'ordre
de
pénétrer
en
mer
Noire,
mais
il
fut
affirmé
qu'il
s'agissait
d'une
opération
de
maintien
de
la
paix
sans
intention
agressive
simplement
destinée
à
décourager
la
flotte
russe
de
toute
atteinte
contre
le
territoire
ottoman
ou
de
toute
nouvelle
attaque
de
navires
turcs.
Toutefois
les
croisières
qui
furent
effectuées
par
nos
bâtiments
trouvèrent
la
mer
vide.
En
effet
la
flotte
russe
qui
était
presque
uniquement
composée
de
voiliers
(2)
se
sentait
en
position
d'infériorité,
aussi
s'était-elle
réfugiée dans ses ports.
Sur
le
plan
diplomatique
les
évènements
allaient
alors
s'accélérer.
Le
4
février
1854,
accusant
la
France
et
l'Angleterre
d'avoir
violé
la
convention
de
1841
en
pénétrant
en
mer
Noire,
Nicolas
1er
rompit
ses
relations
diplomatiques
avec
Paris
et
Londres.
A
leur
tour
les
franco-
britanniques
adressèrent
à
la
Russie
le
27
février
un
ultimatum
la
sommant
d'évacuer
les
Principautés
danubiennes
auquel
il
fut
répondu
par
un
accroissement
de
la
pression
militaire
exercée
par
les
Russes
dans
cette
région.
Il
devint
alors
évident
que
l'envoi
d'un
corps
expéditionnaire
pouvait seul sauver la Turquie de l'invasion, et le 27 mars la France et la Grande Bretagne déclarèrent à leur tour la guerre à la Russie.
Ainsi
débuta
le
conflit
qui
fut
appelé
Russian
War
par
les
Anglais
et
guerre
de
Crimée
par
les
Français.
Sa
particularité
étant
l'absence
de
frontière
commune
entre
les
principaux
belligérants
(3),
les
Marines
alliées
allaient
y
jouer
un
rôle
essentiel
en
transportant
les
troupes
et
leur
matériel
sur
de
longues
distances,
puis
en
assurant
leur
débarquement,
en
maintenant
un
blocus
sur
les
côtes,
et
en
menant
des
attaques
contre
les
places
fortes
situées
sur
le
littoral,
mais
par
contre
elles
n'eurent
jamais
l'occasion
d'affronter
la
Marine
russe,
celle-ci
ayant
toujours
refusé
de
répondre
à
nos
provocations.
Une
autre
particularité
de
cette
guerre
fut
la
part
prise
par
les
vapeurs
qui
se
montrèrent
indispensables pour mener à bien la plupart des actions menées par les flottes alliées.
Les
opérations
principales
se
déroulèrent
sur
deux
théâtres
:
la
mer
Noire
et
la
Baltique.
Les
moyens
déployés
par
la
France
et
l'Angleterre
y
furent
complémentaires
car
si
les
bâtiments
britanniques
engagés
dans
ces
opérations
furent
plus
nombreux
que
les
nôtres,
le
corps
expéditionnaire était principalement composé de troupes françaises.
Les opérations en mer Noire en 1854
Le
premier
problème
à
résoudre
fut
d'acheminer
les
troupes
sur
leur
théâtre
d'opérations.
Alors
que
les
Britanniques
purent
pour
cela
puiser
dans
leur
flotte
commerciale
qui
était
la
première
du
monde,
notre
pays
était
doublement
handicapé
:
alors
que
l'effectif
des
troupes
françaises
engagées
était
bien
supérieur
à
celui
des
troupes
britanniques,
sa
marine
marchande
était
beaucoup
plus
réduite
que
celle
de
nos
alliés,
et
surtout
elle
comprenait
trop
peu
de
vapeurs.
La
réquisition
des
vapeurs
des
Messageries
Impériales
et
l'affrètement
de
navires
de
commerce
français
et
même
étrangers
ne
pouvant
suffire
pour
transporter
la
totalité
de
notre
corps
expéditionnaire
composé
de
58.604
hommes
(contre
25.000
Britanniques),
1313
chevaux,
et
6590
t
de
matériel,
les
navires
de
guerre
furent
chargées
d'assurer
l'acheminement
de
la
majorité
des
hommes,
leur
matériel
ainsi
que
les
chevaux
étant
embarqués
à
bord
de
voiliers.
Toutefois
pour
mener
à
bien
cette
opération
alors
qu'au
même
moment
il
était
décidé
d'envoyer
une
escadre
en
Baltique,
il
fut
nécessaire
de
réarmer
de
nombreux
bâtiments
et
d'activer
l'achèvement
de
ceux
qui
étaient
en
construction.
Le
budget
de
la
Marine
française
fut
alors
porté
à
179
millions,
ce
qui
lui
permit
de
voir
ses
effectifs
s'élever
à
59.000 hommes, et de disposer de 254 navires armés.
Le
lieu
de
rassemblement
choisi
pour
le
corps
expéditionnaire
était
Gallipoli,
à
l'extrémité
est
de
la
mer
de
Marmara.
Pour
franchir
les
quelque
1500
milles
qui
séparaient
la
Turquie
de
la
métropole
les
vapeurs
mettaient
douze
jours,
les
voiliers
remorqués
quinze,
et
ceux
qui
naviguaient
à
la voile de trente à quarante. De plus ces derniers devaient généralement être assistés par un remorqueur pour pénétrer dans les détroits.
De
leur
côté
les
Russes
n'étaient
pas
resté
inactifs,
et
le
14
avril
ils
assiégèrent
Silistrie,
à
une
centaine
de
kilomètres
au
sud-est
de
Bucarest,
dernière
place
forte
avant
Constantinople.
Il
fut
donc
décidé
de
transporter
des
troupes
à
Varna
afin
de
porter
secours
aux
armées
turques.
Toutefois,
si
les
hommes
des
quatre
premières
divisions
de
l'armée
d'Orient
avaient
pu
être
amenés
à
destination
par
huit
frégates
à
vapeur
et
vingt-huit
navires
de
commerce
remorqués,
la
majeure
partie
de
leurs
équipements
qui
étaient
embarqués
à
bord
de
voiliers
n'était
pas
encore
arrivée.
De
plus,
pour
venir
à
bout
de
l'hostilité
manifestée
par
la
Grèce,
une
brigade
avait
dû
être
débarquée
au
Pirée
le
29
mai,
et
les
vapeurs
qui
avaient
été
affectés
à
cette
opération
allaient
cruellement
faire
défaut
lors
de
ce
transfert.
Finalement
5600
hommes
purent
malgré
tout
être
débarqués
à
Varna
le
4
juin.
Mais
deux
jours
plus
tôt
l'Autriche
avait
sommé
la
Russie
d'évacuer
les
Principautés
danubiennes,
et
pour
appuyer
cette
injonction
elle
avait
massé
des
troupes
à
sa
frontière.
Craignant
d'être
pris
entre
deux
feux,
les
Russes
amorcèrent
le
22
juin
un
mouvement de repli, et les territoires occupés furent évacués.
Entretemps
la
frégate
anglaise
Furious
qui
s'était
présentée
le
9
avril
devant
Odessa
sous
pavillon
parlementaire
pour
récupérer
les
ressortissants
britanniques
avait
essuyé
le
tir
des
batteries
côtières.
Pour
venger
cet
affront,
le
21
avril
huit
frégates
à
vapeur
(les
Vauban,
Descartes,
Mogador,
et
cinq
unités
britanniques)
se
présentèrent
devant
le
port
et
ouvrirent
le
feu.
Le
tir
fut
intense
de
part
et
d'autre,
et
le
Vauban,
atteint
par
trois
boulets
rouges
dans
sa
coque
et
ses
roues
à
aubes,
subit
un
début
d'incendie
mais
au
bout
de
dix
heures
les
défenses
de la ville avaient été démantelées et une cinquantaine de navires qui se trouvaient dans le port avaient été coulés.
Comme
nos
armées
ne
souhaitaient
pas
poursuivre
l'Armée
du
tsar
sur
son
immense
territoire,
la
flotte
fut
alors
envoyée
à
Sébastopol
dans
l'espoir
de
provoquer
la
sortie
des
navires
russes,
mais
elle
eut
beau
croiser
pendant
sept
jours
devant
ce
port,
ceux-ci
qui
se
sentaient
en
position
d'infériorité
restèrent
à
l'abri
de
leurs
fortifications.
Par
ailleurs
une
reconnaissance
menée
par
deux
vaisseaux
à
vapeur
(dont
notre
Charlemagne)
et
sept
frégates
à
vapeur
(les
Mogador,
Vauban,
et
cinq
unités
britanniques)
montra
qu'à
l'exception
de
trois
d'entre
eux
tous
les
forts
situés
sur
les
côtes
russes
à
l'est
de
la
Crimée
avaient
été
évacués.
Les
navires
alliés
revinrent
alors
mouiller
à
Baltchik,
au
nord
de
Varna,
le
20
mai.
La
seule
perte
subie
par
les
Alliés
avait
été
celle
de
la
frégate
à
roues
britannique
Tiger
qui,
prise
par
la
brume,
s'était
échouée
sur
la
côte russe et qui fut incendiée par son équipage pour éviter qu'elle tombe aux mains de l'ennemi.
Puisque
la
flotte
russe
refusait
d'affronter
la
flotte
alliée
en
haute
mer,
la
décision
fut
prise
le
18
juillet
de
s'attaquer
à
son
repaire,
la
place
forte
de
Sébastopol.
Mais
il
fallait
faire
vite.
D'une
part
parce
que
la
saison
était
déjà
avancée,
et
d'autre
part
en
raison
d'une
épidémie
de
choléra
qui,
partie
de
Marseille,
se
propageait
dans
le
corps
expéditionnaire
et
finit
par
atteindre
le
17
juillet
l'escadre
mouillée
à
Varna.
Il
était
donc
impératif
de
s'éloigner
du
foyer
de
l'infection.
Pour
assurer
le
siège
de
la
ville
les
Anglais
avaient
réuni
21.500
hommes,
et
les
Français
24.000
auxquels s'ajoutaient 7.000 Turcs.
Le
matériel
accompagnant
ces
troupes
était
lui
aussi
considérable
puisqu'il
comprenait
des
chevaux,
des
batteries
de
campagne
(neuf
britanniques
et
douze
françaises),
un
important
matériel
de
siège,
des
vivres,
et
trente
chalands
à
fond
plat
qui
venaient
d'être
construits
à
Constantinople.
Pour
assurer
le
transport
de
ce
corps
expéditionnaire
les
Britanniques
avaient
affrété
cent-cinquante
navires
de
commerce,
et
parmi
eux
il
y
avait
suffisamment
de
vapeurs
pour
remorquer
les
voiliers,
aussi
les
dix
vaisseaux
dont
deux
à
vapeur
et
les
quinze
frégates
ou
corvettes
à
vapeur
qui
participaient
à
cette
opération
étaient-ils
en
état
de
combattre
si
l'occasion
s'en
présentait.
La
situation
était
bien
différente
pour
les
Français
qui
durent
affréter
des
navires
de
commerce
dans
toute
la
région,
mais
comme
ils
n'étaient
pas
assez
nombreux,
une
fois
encore
notre
flotte
fut
mise
à
contribution.
Et
comme
les
remorqueurs
faisaient
défaut
parmi
les
navires
affrétés,
la
plupart
des
voiliers
dut être envoyée à l'avance sans escorte afin qu'ils se trouvent au rendez-vous lors du débarquement.
La
flotte
britannique
composée
de
dix
vaisseaux
et
quinze
frégates
ou
corvettes
à
vapeur
fut
rejointe
le
8
septembre
à
la
hauteur
du
Danube
par
la
flotte
française
qui
comprenait
quatre
vaisseaux
à
hélice
(les
Napoléon,
Montebello,
Jean
Bart,
et
Charlemagne),
onze
vaisseaux
à
voiles
dont
trois
trois-ponts,
la
frégate
à
hélice
Pomone
et
treize
frégates
à
roues,
trois
frégates
à
voiles
utilisées
comme
transports,
un
transport
à
voiles,
une
corvette
à
hélice
et
six
à
roues,
ainsi
qu'un
aviso
à
hélice
et
trois
à
roues.
A
l'exception
de
six
d'entre
eux
qui
ne
transportaient
"que"
700
hommes,
les
vaisseaux
avaient
dû
chacun
embarquer
de
1300
à
1800
hommes.
Quant
aux
frégates,
quatre
d'entre
elles
avaient
à
leur
bord
1100
hommes
et
30
chevaux,
et
six
autres
de
l'artillerie
et
des
chevaux.
Dans
ces
conditions,
jusqu'à
sa
jonction
avec
les
Anglais,
cette
flotte
n'aurait guère été en état de se défendre si les Russes avaient appareillé pour venir à sa rencontre.
Heureusement
ils
n'en
firent
rien,
et
le
débarquement
débuta
le
14
septembre
au
voisinage
d'Eupatoria,
et
cinq
jours
plus
tard
les
troupes
se
mirent
en
marche
en
direction
de
Sébastopol.
Une
armée
russe
envoyée
à
leur
rencontre
ayant
été
balayée
sur
les
rives
de
l'Alma,
le
corps
expéditionnaire
contourna
la
ville
par
le
sud
et
prit
possession
du
port
de
Balaklava
le
20
septembre,
puis
de
la
baie
de
Kamiesh
huit
jours
plus
tard.
Bien
abritée
et
capable
d'accueillir
aussi
bien
des
navires
de
guerre
que
des
transports,
cette
dernière
va
désormais
servir
de
base
arrière
pour le corps expéditionnaire et lui permettre de recevoir renforts et approvisionnements.
Côté
mer,
Sébastopol
était
défendu
par
de
redoutables
forteresses,
mais
ses
défenses
terrestres
étaient
insuffisantes.
Mettant
à
profit
le
répit
qui
leur
avait
été
accordé,
les
Russes
avaient
pris
un
certain
nombre
de
mesures
pour
pallier
cette
faiblesse.
Au
nord
la
ville
était
adossée
à
un
large
bras
de
mer
qui
en
interdisait
l'approche,
aussi
les
défenses
furent-elles
concentrées
au
sud.
Comme
le
temps
manquait
pour
construire
des
fortifications
en
maçonnerie,
un
puissant
dispositif
de
défense
composé
d'ouvrages
en
terre
y
fut
déployé,
et
il
fut
armé
par
les
quelque
3000
canons
qui
avaient
été
récupérés
sur
les
navires
mouillés
dans
le
port.
Enfin,
pour
interdire
aux
bâtiments
alliés
l'accès
au
bras
de
mer
au
bord duquel était construite la ville, cinq vaisseaux avaient été sabordés dans la passe.
De
leur
côté
les
Alliés
avaient
eux
aussi
débarqué
un
certain
nombre
de
canons
de
leurs
navires
pour
renforcer
leur
artillerie
de
siège,
et
le
17
octobre
ils
passèrent
à
l'attaque.
Cette
offensive
terrestre
était
soutenue
par
la
flotte
qui
était
chargée
de
bombarder
en
même
temps
les
fortifications
situées
sur
le
front
de
mer.
Le
temps
étant
calme
chaque
vaisseau
à
voiles
avait
été
amené
par
une
frégate
à
vapeur
à
sa
position
de
tir
située
à
un
peu
plus
d'un
kilomètre
du
rivage.
Le
combat
dura
quatre
heures
pendant
lesquelles
les
navires
alliés
furent
malmenés
par
l'artillerie
russe.
Le
Napoléon
vit
sa
carène
percée
sous
la
flottaison,
un
obus
sema
la
mort
sur
la
dunette
du
Ville
de
Paris,
un
autre
mit
hors
service la machine du Charlemagne, et trois navires anglais qui avaient été touchés par des boulets rouges connurent un début d'incendie.
Par
ailleurs
les
coques
de
nombreux
bâtiments
furent
atteintes
par
les
projectiles
russes
et
les
gréements
furent
endommagés.
Enfin
504
hommes
furent
mis
hors
de
combat.
Les
dégâts
causés
par
l'artillerie
russe
auraient
d'ailleurs
pu
être
encore
nettement
plus
importants
si
la
fumée
dégagée
par
les
canons
n'avait
gêné
son
tir.
Cette
fumée
était
en
effet
si
épaisse
que
très
vite
seuls
les
mâts
des
navires
étaient
visibles
au
dessus
du
nuage.
Par
contre
les
milliers
de
boulets
et
d'obus
que
nos
navires
avaient
lancés
ne
causèrent
que
des
dommages
insignifiants
aux
murailles
en
granit
des
forts
russes.
Parmi
les
bâtiments
présents
le
seul
qui
ait
obtenu
quelques
résultats
significatifs
était
l'aviso
Vautour
qui
avait
été
transformé
en
bombarde.
Grâce
à
leur
trajectoire
courbe
les
projectiles
lancés
par
les
mortiers
dont
il
était
équipé
étaient
en
effet
passés
au
dessus
des
remparts
pour
s'abattre
sur
des
objectifs
situés
à
l'intérieur
de
la
citadelle.
Même
si
aucun
navire
allié
n'avait
été
perdu,
cette
opération
se
soldait
donc
par
un
échec,
et
elle
démontrait
l'inefficacité
et
la
vulnérabilité
des
navires
en
bois
face
à
une
forteresse
équipée d'une artillerie moderne.
A
terre
les
résultats
avaient
été
tout
aussi
décevants.
Pourtant
les
combats
avaient
été
acharnés.
Mais
les
constructions
défensives
en
terre
s'étaient
montrées
plus
résistantes
que
prévu,
et
surtout
elles
présentaient
l'avantage
de
pouvoir
être
rapidement
remises
en
état
lorsque
des
projectiles
avaient
réussi
à
les
bouleverser.
Les
renforts
parvenus
en
traversant
le
bras
de
mer
situé
au
nord
de
la
ville
permirent
aux
Russes
de
reprendre
l'offensive
le
6
novembre,
mais
ils
furent
repoussés.
Au
total
depuis
le
début
du
siège
11.800
Russes
et
4300
soldats
alliés
avaient
été
mis
hors
de
combat.
Comme
la
mauvaise
saison
était
proche
les
Alliés
décidèrent
de
reporter
au
printemps
la
prochaine
offensive,
et
les
troupes se préparèrent à hiverner sur place.
La
flotte
fut
alors
surprise
par
un
ouragan
qui
balaya
les
côtes
le
14
novembre.
A
Kamiesh
les
Ville
de
Paris,
Bayard,
et
Friedland
perdirent
leur
gouvernail,
et
la
plupart
des
autres
eurent
le
leur
endommagé,
certains
bâtiments
chassèrent
sur
leurs
ancres
et
s'entrechoquèrent,
et
une
quarantaine
de
bricks
français
et
britanniques
fut
drossée
sur
le
rivage.
Ce
fut
pire
encore
au
port
de
Balaklava
occupé
par
les
Anglais.
Comme
ce
site
était
plus
exposé
les
navires
au
mouillage
se
heurtèrent
violemment,
et
sept
transports
furent
coulés.
Par
ailleurs
le
transport
Danube
sombra
au
large
du
cap
Chersonèze,
et
devant
Eupatoria
le
vaisseau
Henri
IV
et
la
corvette
à
vapeur
Pluton
furent
drossés
sur
le
rivage
et
ne
purent
être
remis
à
flot.
Afin
de
limiter
les
dégâts
en
cas
de
nouvelle
tempête
il
fut
décidé
de
ne
garder
sur
place
que
huit
vaisseaux
à
voiles
(dont
deux
français
:
les
Marengo
et
Alger),
six
à
vapeur
(dont
trois
français
:
le
Napoléon,
le
Jean
Bart,
et
le
Montebello),
et
une
partie
des
frégates
à
vapeur.
Cette
décision
de
retrait
était
également
motivée
par
la
nécessité
de
mettre
fin
à
l'épidémie
de
scorbut
qui
sévissait
à
bord
de nos navires (4) et par le mauvais état de certains d'entre eux.
Dernier
épisode
de
l'année
sur
mer,
le
6
décembre
deux
vapeurs
russes,
une
corvette
et
une
frégate,
sortirent
de
Sébastopol
en
direction
des
bases
alliées.
Elles
furent
prises
à
parti
par
la
corvette
Mégère
et
l'aviso
Dauphin
qui
étaient
de
garde
à
la
sortie
du
port,
mais
l'arrivée
de
trois
frégates
alliées
venues
à
la
rescousse
(le
Vauban
le
Panama,
et
une
frégate
britannique)
contraignit
rapidement
les
Russes
à
cesser
le
combat
et
à regagner leur base.
Déçu
par
les
évènements
survenus
en
Crimée,
Napoléon
III
décida
d'augmenter
les
effectifs
du
corps
expéditionnaire,
et
à
nouveau
se
posa
le
problème
de
leur
transport.
La
Marine
était
d'autant
moins
capable
d'assurer
à
elle
seule
leur
acheminement
qu'une
partie
de
ses
grands
bâtiments
était
en
mer
Noire,
et
que
ceux
qui
en
étaient
revenus
avaient
besoin
d'être
remis
en
état
après
de
longs
mois
de
campagne.
En
particulier
rares
étaient
les
vapeurs
disponibles,
alors
que,
compte
tenu
du
temps
régnant
dans
cette
région
à
cette
époque
de
l'année,
il
n'était
guère
indiqué
d'utiliser
des
voiliers
pour
effectuer
la
liaison
Constantinople-Sébastopol.
Les
navires
de
retour
de
Baltique
ayant
été
transformés
en
transports,
la
Marine
put
assurer
l'acheminement
d'une
partie
des
renforts
jusqu'à
Constantinople
où
ils
étaient
transférés
à
bord
de
navires
de
commerce
affrétés
pour
effectuer
la
deuxième
partie
du
trajet.
Pour
favoriser
ce
transfert
de
troupes
la
Grande
Bretagne
mit
également
à
notre disposition un certain nombre de navires de guerre et des navires marchands affrétés.
La campagne de Baltique en 1854
Parallèlement
les
Alliés
avaient
également
décidé
d'attaquer
la
Russie
par
le
nord,
avec
pour
principal
objectif
la
base
navale
de
Kronstadt.
Le
11
mars
une
imposante
flotte
anglaise
composée
de
huit
vaisseaux
mixtes,
quatre
frégates
à
hélice,
et
trois
corvettes
à
roues
appareilla
pour
la
Baltique
où
elle
sera
rejointe
par
la
suite
par
cinq
vaisseaux
mixtes,
six
vaisseaux
à
voiles,
et
neuf
unités
à
roues,
et
à
partir
du
1er
mai
par
le
vaisseau
mixte
français
Austerlitz.
La
Marine
française
ayant
alors
pour
tâche
principale
le
transport
du
corps
expéditionnaire
en
mer
Noire,
c'est
seulement
le
20
avril
qu'un
premier
échelon
composé
de
quatre
vaisseaux
et
deux
frégates
à
voiles
portant
2500
hommes
de
troupe
fut
en
mesure d'appareiller à son tour.
Toutefois
ces
bâtiments
étaient
mal
équipés,
et
leurs
équipages
ainsi
que
leurs
approvisionnements
étaient
incomplets.
De
plus
des
pilotes
anglais
qu'ils
embarquèrent
aux
Dunes
afin
de
les
guider
lors
du
passage
des
détroits
n'avaient
aucune
expérience
des
voiliers
qui,
contrairement
aux
vapeurs,
devaient
composer
avec
les
vents
et
les
courants.
Le
reste
de
la
traversée
fut
un
vrai
cauchemar,
les
calmes
plats
alternant avec les tempêtes, et cette formation n'atteignit Kiel que le 20 mai.
Elle
y
sera
rejointe
par
quatre
vaisseaux
et
deux
frégates
accompagnés
des
avisos
à
hélice
Lucifer
et
Souffleur,
et
l'ensemble
de
ces
bâtiments
quitta
ce
port
neuf
jours
plus
tard.
Une
épidémie
de
scorbut
et
de
variole
s'étant
déclarée
à
bord
des
navires,
ils
durent
toutefois
laisser
derrière
eux
le
Breslaw
qui
comptait
plus
de
cent
malades.
Finalement
le
13
juin,
soit
cinquante-trois
jours
après
son
départ
de
France,
cette
flotte
rejoignit
enfin
l'escadre
britannique
à
Bärö
Sund,
(actuellement
en
Finlande
à
l'extrémité
sud
du
golfe
de
Bothnie).
Ce
périple
aurait
pu
être
notablement
écourté
si
ces
voiliers
avaient
pu
comme
les
navires
anglais
disposer
de
remorqueurs
qui
leur
auraient
permis
de
progresser
malgré les vents contraires et les périodes de calme, et qui auraient également facilité leur navigation dans les eaux resserrées des Détroits.
Le
22
juin
une
escadre
composée
de
dix-huit
vaisseaux
(dont
six
vaisseaux
à
voiles
français
remorqués
par
des
unités
britanniques),
quelques
frégates,
et
des
bâtiments
légers
vint
prendre
position
devant
la
citadelle
de
Kronstadt
qui
défendait
l'accès
à
Saint
Petersbourg.
Elle
espérait
cette
fois
encore
inciter
la
flotte
russe
à
livrer
bataille,
mais
comme
à
Sébastopol,
celle-ci
refusa
de
sortir.
Il
était
donc
inutile
de
s'éterniser,
et
comme
de
plus
une
épidémie
de
choléra
s'était
déclarée
à
bord,
cette
escadre
leva
l'ancre
le
2
juillet.
Pendant
son
séjour
au
large
de
Kronstadt
le Duguesclin avait subi de graves avaries en heurtant un rocher à pleine vitesse.
L'objectif
suivant
fut
la
forteresse
de
Bomarsund
bâtie
dans
les
îles
d'Aland
situées
à
la
sortie
du
golfe
de
Bothnie
qui
constituaient
un
bastion
avancé
russe
face
à
la
Suède.
A
cet
effet
une
troupe
de
10.000
soldats
français
s'était
embarquée
à
Boulogne
le
18
juillet
à
bord
de
quatre
vaisseaux,
trois
frégates,
et
sept
transports
britanniques,
et
ils
furent
suivis
deux
jours
plus
tard
par
le
chef
de
l'expédition
à
bord
du
yacht
impérial Reine Hortense.
Le
11
août
quatorze
vaisseaux
à
vapeur
(dont
un
français),
dix-sept
vaisseaux
à
voiles
(dont
onze
français),
trois
frégates
à
voiles
françaises,
et
onze
frégates
ou
corvettes
à
vapeur
(dont
cinq
françaises)
se
déployèrent
autour
de
l'archipel,
et
le
siège
de
la
forteresse
débuta.
Des
troupes
furent
débarquées
et,
soumise
à
leur
pression
et
aux
tirs
de
l'escadre,
la
place
tomba
cinq
jours
plus
tard.
Une
reconnaissance
fut
alors
tentée
vers
Hanko
(actuellement
en
Finlande
près
de
la
sortie
du
golfe
homonyme)
et
Reval
(actuel
Tallinn
en
Estonie).
Ce
fut
pour
constater
que
les
forts
d'Hanko
étaient
en
cours
de
démantèlement.
Par
contre
ils
furent
accueillis
à
Reval
par
un
tir
intense
qui
les
dissuada
de
tenter
un
débarquement.
Un
moment
envisagée,
l'idée
d'attaquer
Sveaborg
(actuel
Helsinki),
sera
elle
aussi
abandonnée
en
raison
de
la
puissance
des
ouvrages
qui
défendaient
la
ville,
et
finalement,
comme
la
saison
était
déjà
avancée,
les
Alliés
décidèrent
de
quitter
la
Baltique
avant
qu'elle
soit prise par les glaces.
Les opérations en mer Blanche et en Extrême Orient
A
l'extrême
nord
de
la
Russie
une
division
franco-britannique
composée
de
deux
frégates
à
voiles
et
trois
corvettes
à
vapeur
chargée
d'exercer
le blocus des côtes détruisit le monastère fortifié de Solovetski et bombarda Kola. Par ailleurs une goélette russe fut capturée.
Pendant
ce
temps,
à
l'autre
extrémité
de
cet
immense
territoire,
une
formation
alliée
composée
de
deux
frégates,
six
corvettes,
et
un
sloop
avait
décidé
d'attaquer
Petropavlovsk
au
Kamtchatka.
Une
attaque
par
mer
s'étant
avérée
impossible
en
raison
de
l'importance
du
dispositif
défensif
de
la
ville,
700
hommes
furent
débarqués
le
4
septembre
dans
l'espoir
de
pouvoir
prendre
la
place
à
revers,
mais
ils
furent
assaillis
par
des troupes russes qui leur infligèrent de lourdes pertes, ce qui les obligea à rembarquer moins de trois heures après avoir touché terre.
1855 : l'expédition en mer d'Azov
En
mer
Noire,
pendant
l'hiver,
les
opérations
s'étaient
poursuivies
sur
le
front
terrestre,
constituées
essentiellement
de
guerre
de
tranchées
et
de
duels
d'artillerie
appuyés
par
la
flotte
franco-britannique
qui
à
plusieurs
reprises
effectua
des
bombardements
de
nuit
des
fortifications
du
front
de
mer
afin
de
dissuader
les
Russes
de
les
dégarnir
au
profit
de
leurs
ouvrages
terrestres.
Mais,
soumis
au
froid
et
au
manque
d'approvisionnements
de
toutes
sortes,
les
soldats
furent
décimés
par
les
épidémies.
Insuffisamment
aguerries,
les
troupes
britanniques
en
furent
les
principales
victimes,
au
point
que
leurs
pertes
ne
purent
être
compensées
par
les
maigres
renforts
envoyés.
Par
contre
l'Armée
française
dont
certains
éléments
avaient
combattu
en
Algérie
au
cours
des
années
précédentes
sut
mieux
s'accommoder
des
conditions
pénibles
qu'elle
eut
à
subir.
Les
pertes
y
furent
moins
sévères,
et
le
grand
nombre
d'hommes
disponibles
en
métropole
permit
d'accroître
sensiblement ses effectifs. C'est donc elle qui va jouer le rôle principal au cours des opérations ultérieures.
Sur
mer
à
partir
du
1er
février
la
flotte
alliée
fut
chargée
d'assurer
le
blocus
de
tous
les
ports
russes
de
la
mer
Noire
pour
mettre
fin
au
trafic
de
contrebande de guerre qui s'était établi à partir des ports neutres de Méditerranée.
La
mort
du
tsar
survenue
le
2
mai
laissa
entrevoir
la
possibilité
d'une
paix
prochaine,
mais
le
nouveau
tsar
Alexandre
II
fit
échouer
la
tentative
de négociation menée sous l'égide des Autrichiens.
Comme
une
partie
du
ravitaillement
à
destination
de
Sébastopol
passait
par
la
mer
d'Azov,
le
3
mai
une
troupe
composée
de
7200
français,
2800
britanniques,
et
quatre
batteries
d'artillerie
fut
envoyée
pour
en
prendre
le
contrôle.
Elle
était
transportée
par
quarante
vapeurs
dont
treize
français
(les
vaisseaux
Montebello
et
Jean
Bart,
les
frégates
Sané,
Descartes,
Cacique,
Caffarelli,
et
Pomone,
les
corvettes
Roland,
Phlégéton,
et
Berthollet,
et
trois
avisos
:
Mégère,
Lucifer,
et
Fulton).
Mais
le
lendemain
cette
flotte
fut
rejointe
par
l'aviso
Dauphin
qui
lui
transmit l'ordre de faire demi-tour.
Ce
contrordre
avait
pour
origine
une
nouveauté
survenue
peu
de
temps
auparavant
:
depuis
le
25
avril
un
câble
immergé
en
mer
Noire
avait
en
effet
permis
d'établir
une
liaison
télégraphique
entre
Paris
et
la
Crimée
(5),
ce
qui
permettait
à
l'Empereur
et
aux
état
majors
parisiens
qui
n'avaient
qu'une
connaissance
imparfaite
des
réalités
du
terrain
de
contrôler
presque
en
temps
réel
les
opérations
militaires.
Il
en
résultera
un
certain
nombre
d'interférences
malheureuses
entre
les
décisions
prises
localement
et
les
ordres
reçus
de
Paris,
et
c'est
ce
qui
s'était
produit
à
cette
occasion.
En
fait
cette
expédition
était
envisagée
depuis
quelques
temps
déjà,
et
alors
que
le
télégraphe
venait
juste
d'être
mis
en
service,
la
date
de
son
départ
avait
été
décidée
localement
sans
en
informer
Paris,
alors
que
Napoléon
III
de
son
côté
avait
choisi
de
la
remettre
à
plus
tard
et
d'envoyer
à
Constantinople
tous
les
navires
disponibles
pour
transporter
les
troupes
de
réserve
cantonnées
en
Turquie
afin
de
lancer
une
grande
offensive
en
Crimée,
et
la
dépêche
faisant
part
de
ses
intentions
n'était
parvenue
qu'après
le
départ
de
cette
expédition.
Incapables
de mener à eux seuls cette opération, les Britanniques durent à contrecœur eux aussi rentrer au port.
En
fait
l'offensive
en
Crimée
conçue
par
l'Empereur
fut
jugée
trop
risquée,
et
sous
la
pression
des
Britanniques
une
nouvelle
expédition
quitta
la
Crimée
pour
la
mer
d'Azov
le
22
mai.
Elle
comprenait
7000
Français,
3000
Anglais,
5000
Turcs,
et
cinq
batteries
d'artillerie
embarqués
à
bord
de
cinquante-six
bâtiments
de
guerre
à
vapeur
dont
vingt-trois
français
(les
vaisseaux
Montebello,
Charlemagne,
et
Napoléon,
les
frégates
Mogador,
Descartes,
Cacique,
Caffarelli,
Asmodée,
Ulloa,
et
Pomone,
les
corvettes
Primauguet,
Roland,
Berthollet,
Phlégéton,
Caton,
et
Véloce,
les
avisos
Lucifer,
Mégère,
Milan,
Dauphin,
Fulton,
et
Brandon,
et
la
bombarde
Vautour).
Estimant
leurs
forces
insuffisantes,
les
Russes
n'opposèrent aucune résistance, et les Alliés purent occuper les deux rives du détroit de Kertch qui ouvrait l'accès à la mer d'Azov.
Le
25
mai
une
flottille
de
quatorze
canonnières
et
avisos
(dont
quatre
navires
français)
y
pénétra
et
en
fit
le
tour,
détruisant
récoltes,
magasins,
et
tout
ce
qui
flottait.
Le
8
juin
les
bâtiments
de
haute
mer
regagnèrent
Kamiesh
tandis
que
les
canonnières
et
les
avisos
poursuivaient
leurs
raids.
Bien
que
profondément
désorganisées
par
notre
offensive,
les
voies
d'accès
à
Sébastopol
par
l'est
n'étaient
toutefois
pas
complètement
coupées,
car
la
faible
profondeur
de
l'eau
n'avait
pas
permis
aux
bâtiments
alliés
de
détruire
un
pont
en
bois
situé
dans
une
zone
marécageuse
à l'extrémité ouest de la mer d'Azov.
La chute de Sébastopol
Pendant
ce
temps
les
opérations
s'intensifiaient
autour
de
Sébastopol.
Le
7
juin
les
troupes
alliées
emportèrent
les
défenses
extérieures
de
la
citadelle,
et
sur
cette
lancée
un
grand
assaut
fut
tenté
le
18
juin,
mais
il
se
traduisit
par
un
sanglant
échec,
5200
hommes
ayant
été
mis
hors
de
combat.
Le
16
août
les
Russes
qui
avaient
pu
recevoir
des
renforts
tentèrent
de
desserrer
l'étau
qui
entourait
la
ville,
mais
cette
offensive
fut
elle
aussi
un
échec
qui
leur
coûta
8000
hommes.
A
partir
du
17
août
les
positions
russes
furent
soumises
à
un
bombardement
systématique.
Celui-ci
s'accentuera
encore
à
partir
du
5
septembre,
et
l'assaut
final
fut
déclenché
le
8.
La
prise
du
bastion
de
Malakhov,
élément
essentiel
du
dispositif
défensif,
conduisit
les
Russes
à
évacuer
la
ville
par
le
nord
en
empruntant
un
pont
de
bateaux
après
avoir
détruit
leurs
installations
et
mis
le
feu
aux
navires
présents
dans
le
port.
Il
avait
été
prévu
que
la
flotte
appuie
l'offensive
terrestre
en
bombardant
le
front
de
mer,
mais
elle
dut
y
renoncer
en
raison
d'un
vent
contraire
et
de
la
houle
qui
aurait
empêché
les
vaisseaux
d'ouvrir
les
sabords
de
leurs
batteries
basses,
les
privant
ainsi
de
leurs
plus
puissants
canons.
Par
contre
les
dix
bombardes
(dont
quatre
françaises)
qui
étaient
mouillées
dans
la
baie
de
Streletska entretinrent un feu nourri contre les positions ennemies (606 bombes furent lancées par les bombardes françaises).
La
chute
de
Sébastopol
était
certes
un
succès
pour
les
Alliés,
mais
comme
nos
troupes
n’avaient
pas
n'avaient
pas
l'intention
de
s'enfoncer
dans
le
territoire
russe
à
la
poursuite
des
armées
ennemies
fortes
de
150.000
hommes,
la
situation
était
à
nouveau
bloquée.
Plusieurs
projets
offensifs
furent
alors
évoqués,
et
finalement
il
fut
décidé
d'attaquer
la
forteresse
de
Kinburn
située
à
l'embouchure
du
Dniepr
et
du
Bug,
fleuves
par où transitait une part importante du ravitaillement de l'armée russe de Crimée.
La
flotte
française
en
mer
Noire
comptait
alors
soixante
bâtiments
presque
tous
à
vapeur
:
six
vaisseaux
(dont
deux
à
voiles),
sept
frégates,
six
corvettes,
six
avisos,
cinq
bombardes
(dont
une
à
voiles),
dix
canonnières
(dont
deux
à
voiles),
huit
chaloupes
canonnières,
et
surtout
les
trois
batteries
flottantes
cuirassée
Dévastation,
Lave,
et
Tonnante.
L'acheminement
de
ces
dernières
ne
s'était
pas
effectué
sans
difficultés
car
ces
bâtiments
incapables
de
gouverner
à
la
voile
et
d'une
lenteur
désespérante
à
la
vapeur
durent
être
remorqués
par
les
frégates
Albatros,
Magellan,
et
Darien,
mais
leur
gouvernail
manquant
d'efficacité,
elles
avaient
tendance
à
embarder,
et
leurs
remorques
furent
rompues
à
plusieurs
reprises.
Parties
de
Brest,
Lorient,
et
Cherbourg
entre
le
30
juillet
et
le
10
août,
ces
batteries
arrivèrent
à
Sébastopol
entre
le
12
et
le
25 septembre, ayant effectué la traversée à la vitesse moyenne de 4,5 n.
Les
6
et
7
octobre
une
flotte
de
quatre-vingt-dix
bâtiments
tous
à
vapeur
dont
trente-cinq
français
(quatre
vaisseaux,
quatre
frégates,
quatre
corvettes,
quatre
avisos,
quatre
canonnières,
trois
batteries
flottantes
cuirassées,
sept
chaloupes
canonnières,
et
cinq
bombardes)
appareilla
de
Kamiesh
et
Balaklava
accompagnée
d'une
flotte
de
transport
qui
avait
à
son
bord
8000
hommes
de
troupe.
Retardée
par
des
vents
forts
et
une
brume
épaisse,
elle
ne
parvint
au
large
de
Kinburn
que
le
14.
Située
sur
un
isthme,
la
forteresse
était
constituée
d'un
ouvrage
en
pierre
armé
d'une
soixantaine
de
canons
complété
par
deux
batteries
comptant
une
dizaine
de
bouches
à
feu
situées
en
direction
de
l'extrémité
de
l'isthme
et par des batteries implantées de l'autre côté de la passe donnant accès à l'estuaire. La supériorité alliée était donc écrasante.
Kindburn, l’hive
Les
chaloupes
canonnières
pénétrèrent
dans
l'estuaire
pour
prendre
les
défenses
russes
à
revers,
et
le
lendemain
des
troupes
furent
débarquées
au
sud
du
fort
hors
de
portée
de
ses
canons
afin
de
couper
la
retraite
de
la
garnison
ennemie.
Ancrées
au
large
les
canonnières
et
les
bombardes
ouvrirent
alors
le
feu,
mais
pour
peu
de
temps,
car
elles
étaient
ballotées
par
la
houle,
ce
qui
rendait
leur
tir
inefficace.
Le
temps
s'améliorant
le
bombardement
put
reprendre
le
17.
Les
trois
batteries
flottantes
s'avançant
par
leurs
propres
moyens
vinrent
prendre
position
entre
850
et
1150
m
du
fort.
Elles
étaient
appuyées
par
les
canonnières
qui
en
étaient
distantes
de
1300
m
et
par
les
bombardes
qui
avaient
été
mouillées
à
2500
m
tandis
que
de
son
côté
l'artillerie
débarquée
se
trouvait
à
400
m
de
ses
murailles.
Grâce
aux
observateurs
embarqués
sur
les avisos le tir des bombardes put être rectifié en permanence, aussi se montra-t-il d'une grande efficacité.
Au
bout
d'une
demi-heure
des
incendies
se
déclarèrent
dans
les
magasins
de
la
forteresse,
et
la
défense
russe
commença
à
faiblir.
Les
canonnières
se
portèrent
alors
à
la
hauteur
des
batteries
flottantes,
et
les
vaisseaux
qui
jusque
là
étaient
restés
au
large
s'approchèrent
à
1600
m
et
ouvrirent
le
feu
à
leur
tour
tandis
que
les
frégates
franchissaient
la
passe
pour
prendre
elles
aussi
les
défenseurs
à
revers.
Bombardé
de
tous
côtés,
le
fort
fut
rapidement
dévasté,
et
après
six
heures
de
résistance
les
Russes
durent
se
résigner
à
capituler.
Le
18
cette
victoire
sera
parachevée par la décision prise par les Russes de faire sauter les fortifications situées de l'autre côté de la passe.
Cette
première
utilisation
de
bâtiments
cuirassés
eut
un
grand
retentissement.
Tout
au
cours
de
l'action,
les
batteries
purent
impunément
lancer
plus
de
3000
projectiles.
Pendant
ce
temps
les
boulets
qui
les
atteignaient
rebondissaient
sur
leurs
cuirasses
en
laissant
des
traces
de
moins
de
3
cm
de
profondeur,
et
les
obus
se
brisaient
sans
éclater.
Bien
à
l'abri
derrière
le
blindage,
les
équipages
n'eurent
à
déplorer
que
deux
morts
et
vingt-deux
blessés,
ces
pertes
étant
dues
à
des
projectiles
qui
avaient
réussi
à
pénétrer
par
les
sabords.
Il
est
vrai
que
ces
bâtiments
n'avaient
eu
à
affronter
que
des
pièces
de
24
et
que
la
question
restait
posée
de
savoir
quel
aurait
été
leur
comportement
face
à
des
canons
de
50 ou de 68.
Il
avait
initialement
été
envisagé
de
poursuivre
cette
offensive
en
attaquant
les
villes
de
Nicolajev
et
Kherson
qui
étaient
situées
en
amont,
l'une
sur
le
Bug,
l'autre
sur
le
Dniepr,
et
qui
constituaient
des
nœuds
de
communication
pour
le
trafic
alimentant
l'armée
d'Ukraine,
mais
comme
la
saison
était
trop
avancée,
la
décision
fut
prise
d'hiverner
sur
place.
Alors
que
l'escadre
rentrait
à
Kamiesh,
les
ruines
du
fort
furent
relevées,
et
une
station
navale
constituée
des
trois
batteries
flottantes,
de
quatre
canonnières,
de
deux
chaloupes
canonnières,
et
d'un
transport
resta
sur
place.
Mais
comme
le
précédent
l'hiver
fut
particulièrement
éprouvant
pour
l'ensemble
du
corps
expéditionnaire.
A
Kinburn
l'estuaire
fut
pris
par les glaces, et quand survint la débâcle les batteries flottantes durent être échouées afin d'éviter qu'elles soient emportées.
Les opérations en Baltique en 1855
La
majeure
partie
des
effectifs
disponibles
ayant
été
affectée
à
la
mer
Noire,
aucune
opération
combinée
d'envergure
ne
pouvait
être
menée
en
Baltique.
Les
seules
actions
envisageables
étaient
donc
la
reprise
du
blocus
des
côtes
russes
et
l'attaque
de
forteresses
côtières
mais
les
batteries
flottantes,
conçues
pour
ce
théâtre,
n'étaient
pas
encore
disponibles.
Au
printemps
la
flotte
anglaise
composée
de
dix-sept
vaisseaux,
dix-sept
frégates,
dix-neuf
bombardes,
et
onze
canonnières
parvint
la
première
sur
place,
et
elle
assura
aussitôt
un
blocus
effectif
des
golfes
de
Finlande
et
de
Bothnie.
Elle
sera
rejointe
le
1er
juin
par
une
flotte
française
qui
était
partie
de
France
un
mois
plus
tôt
et
qui
comprenait
trois
vaisseaux, les Tourville, Austerlitz, et Duquesne, et la corvette à vapeur d'Assas.
La
première
mission
de
l'escadre
franco-britannique
fut
une
nouvelle
reconnaissance
de
la
forteresse
de
Kronstadt.
Depuis
l'année
précédente
les
Russes
avaient
considérablement
renforcé
les
défenses
de
leurs
citadelles
côtières,
et
de
celles
de
Kronstadt
en
particulier,
à
l'aide
de
batteries,
de
canonnières
à
vapeur,
et
d'obstacles
sous-marins.
De
plus,
pour
la
première
fois
dans
l'histoire,
ils
avaient
utilisé
des
mines
sous-
marines.
Contenant
une
charge
de
3,5
kg
de
poudre,
elles
étaient
conçues
pour
exploser
lorsqu'elles
étaient
heurtées
par
la
carène
d'un
navire.
La
corvette
britannique
Merlin
en
fut
la
première
victime.
Alors
qu'elle
avait
été
envoyée
en
compagnie
de
la
corvette
française
d'Assas
et
d'un
autre
navire
britannique
pour
explorer
les
abords
de
la
forteresse
en
se
tenant
hors
de
portée
de
ses
canons,
elle
heurta
successivement
deux
de
ces
engins
alors
qu'elle
se
trouvait
à
deux
milles
et
demi
de
la
terre
et
le
Firefly
qui
l'accompagnait
heurta
à
son
tour
une
troisième
mine,
mais les charges utilisées étaient trop faibles pour leur causer des dégâts sérieux, et ces deux bâtiments purent poursuivre leur mission.
Les
observations
effectuées
permirent
de
constater
la
quasi
perfection
des
ouvrages
défensifs
mis
en
place
par
les
Russes
ainsi
que
la
présence
de
quatre
vaisseaux,
quatre
frégates,
et
quinze
canonnières
à
hélice.
Aussi
comme
sur
les
dix
batteries
flottantes
spécifiquement
conçues
pour
assaillir
cette
forteresse
seules
trois
étaient
achevées
ou
sur
le
point
de
l'être,
il
fut
jugé
qu'une
attaque
de
Kronstadt
eut
été
vouée
à
l'échec.
On
renonça
donc
à
envoyer
de
nouveaux
bâtiments
en
Baltique,
et
les
trois
batteries
flottantes
furent
envoyées
en
mer
Noire
où,
comme
nous
l'avons vu, elles s'illustrèrent à Kinburn.
Il
fut
alors
décidé
d'attaquer
la
forteresse
de
Sveaborg,
ensemble
d'ouvrages
construits
sur
des
îlots
qui
défendait
l'accès
à
la
ville
d'Helsingfors
(actuel
Helsinki).
Entretemps
une
flottille
française
composée
de
trois
avisos
(Aigle,
Pélican,
Tonnerre),
quatre
canonnières
de
première
classe
(Aigrette,
Avalanche,
Dragonne,
Fulminante),
deux
de
deuxième
classe
(Tempête,
Tourmente),
et
cinq
bombardes
(Tocsin,
Fournaise,
Trombe,
Torche,
Bombe)
était
parvenue
en
Baltique.
Quinze
bâtiments
dont
dix
vaisseaux
furent
laissés
devant
Kronstadt,
et
un
ensemble
de
soixante-
treize
navires
se
présenta
le
7
août
devant
la
forteresse
de
Sveaborg.
Cinq
mortiers
furent
installés
durant
la
nuit
sur
un
îlot
situé
à
2200
m
de
la
place
forte,
et
le
lendemain
les
canonnières
placées
en
première
ligne
et
les
bombardes
embossées
un
peu
plus
loin
ouvrirent
le
feu,
les
grands
bâtiments se tenant en retrait au large.
Comme
ce
sera
le
cas
à
Kinburn
un
peu
plus
tard
les
bombardes
se
montrèrent
particulièrement
efficaces.
On
put
observer
des
incendies
et
des
explosions,
et
de
nombreuses
batteries
furent
démantelées.
Au
bout
de
trois
jours
de
pilonnage
au
cours
duquel
les
Français
avaient
tiré
1322
boulets,
634
obus,
et
2194
bombes,
le
tir
cessa
le
11
à
4
heures
du
matin
en
raison
d'une
usure
excessive
des
mortiers
britanniques.
Si
les
murs
des
fortifications
avaient
assez
bien
résisté,
par
contre
les
magasins
et
les
réserves
de
poudre
avaient
été
dévastés.
De
plus
dix-huit
navires
situés
dans
le
port
avaient
été
atteints,
dont
six
vaisseaux,
deux
frégates,
et
une
corvette
qui
furent
jugés
irréparables.
Quant
au
nombre
de
morts, côté russe il s'élevait à 2000 contre un mort et une dizaine de blessés côté alliés.
La
saison
étant
déjà
avancée,
les
alliés
vont
désormais
se
contenter
de
poursuivre
pendant
quelque
temps
leurs
opérations
de
harcèlement
contre
le
littoral
russe,
coulant
de
nombreux
navires
et
détruisant
des
installations
à
terre,
et
dès
le
11
septembre
les
bombardes
et
les
canonnières quittèrent la région, suivies le 6 décembre par le reste de la flotte.
Les opérations au nord de la Russie et en Extrême Orient
Deux
frégates
et
quatre
corvettes
furent
envoyées
pour
établir
un
blocus
en
mer
Blanche
où
elles
arrivèrent
le
11
juin
1855.
Les
caboteurs
rencontrés
furent
arraisonnés,
et
une
soixantaine
de
récalcitrants
furent
détruits
avec
leur
cargaison.
Par
ailleurs
lorsque
nos
embarcations
essuyèrent
des
tirs
venant
de
terre,
la
ville
ou
le
village
d'où
étaient
partis
ces
tirs
furent
soumis
à
des
représailles.
Nos
équipages
souffrant
cette
fois
encore
du
scorbut,
les
Anglais
leur
cédèrent
du
jus
de
citron
dont
ce
fut
la
première
utilisation
dans
la
Marine
française,
mais
il
faudra
encore un certain temps avant que cette pratique soit admise par notre corps médical et généralisée.
En
Extrême
Orient
ce
sont
cette
fois
douze
bâtiments
qui
furent
envoyés.
Mais
là
encore
les
Russes
avaient
évacué
leurs
installations
côtières.
Même la place forte de Petropavslosk fut trouvée vide de ses occupants, et après en avoir détruit l'arsenal les Alliés quittèrent la région.
La paix
Alors
que
l'Angleterre
échafaudait
des
plans
d'attaque
de
Kronstadt,
en
France
les
récoltes
avaient
été
mauvaises
et
la
guerre
était
de
plus
en
plus
impopulaire.
Conscient
du
fait
qu'il
était
inutile
d'espérer
qu'une
victoire
significative
puisse
mettre
fin
à
cette
guerre
atypique
qui
opposait
deux
puissances
dont
la
supériorité
était
essentiellement
maritime
à
un
pays
immense
qui,
quarante
ans
plus
tôt,
avait
mis
en
échec
la
Grande
Armée,
Napoléon
III
prit
l'initiative
en
amorçant
des
négociations
avec
le
tsar
par
l'entremise
de
l'Autriche.
Le
moment
était
bien
choisi
car
la
Russie
était
alors
isolée
:
la
Suède
était
prête
à
rallier
les
Alliés
et,
poussée
par
la
France,
l'Autriche
menaça
le
16
décembre
d'en
faire
autant
si
les
Russes
refusaient
de
se
soumettre
à
un
ultimatum
en
quatre
points
qui
leur
fut
adressé.
Quant
à
la
Prusse,
si
elle
entendait
rester
neutre,
elle
pressait
le
tsar
de
faire
la
paix.
Comme
de
plus
l'Etat
russe
était
proche
de
la
banqueroute,
Alexandre
II
fut
amené
à
accepter
le
16
janvier
1856
les
conditions
posées
par
l'ultimatum
autrichien,
et
en
février
un
Congrès
réunissant
toutes
les
puissances
européennes
(Russie
comprise)
s'ouvrit à Paris. Il déboucha le 30 mars sur le traité de Paris qui mit un terme au conflit.
Par
ce
traité
les
puissances
européennes
garantissaient
l'indépendance
et
l'intégrité
de
l'empire
ottoman
qui
de
son
côté
s'engageait
à
maintenir
l'égalité
de
traitement
des
chrétiens
et
des
musulmans
sur
son
territoire.
Par
ailleurs
les
puissances
signataires
s'engageaient
à
faire
respecter
la
liberté
de
navigation
sur
le
Danube.
Enfin,
en
ce
qui
concerne
la
mer
Noire,
la
convention
des
Détroits
de
1841
était
confirmée
et
même
durcie,
puisque
cette
mer
était
neutralisée,
de
sorte
que
ni
le
sultan
ni
le
tsar
ne
pouvaient
plus
y
entretenir
une
flotte
de
guerre.
Seule
était
autorisée
la
présence
de
petites
unités
chargées
de
la
défense
des
côtes.
Plusieurs
dispositions
réglementant
la
guerre
sur
mer
furent
également
prises
à
cette
occasion,
la
plus
importante
étant
l'abolition
de
la
guerre
de
course
menée
par
les
corsaires.
En
outre
les
droits
des
neutres
furent
précisés
:
selon
ces
accords,
en
dehors
de
la
contrebande
de
guerre,
toute
marchandise
transportée
sous
pavillon
neutre
fut
déclarée inviolable, et il fut également décidé que les navires neutres ne seraient astreints à respecter un blocus que si il était effectif.
Bien
que
les
flottes
alliées
n'aient
jamais
eu
l'occasion
d'affronter
les
escadres
russes,
les
forces
navales
franco-britanniques
jouèrent
un
rôle
déterminant
tout
au
long
de
la
guerre
de
Crimée.
D'une
part
elles
se
montrèrent
capables
d'acheminer
536.403
hommes,
50.974
chevaux,
et
724.536
tonnes
de
matériel,
dont
273.780
hommes,
4266
chevaux,
et
116.661
tonnes
de
matériel
pour
la
seule
la
Marine
française
qui
mit
en
œuvre
à
cet
effet
cent-trente-deux
bâtiments
(onze
vaisseaux
mixtes,
vingt-et-un
vaisseaux
à
voiles,
dix-neuf
frégates
à
vapeur,
dix-neuf
frégates
à
voiles,
vingt-et-une
corvettes
et
dix-sept
avisos
à
vapeur,
ainsi
que
vingt-quatre
transports
à
voiles
ou
à
vapeur).
Au
cours
de
ces
traversées
une
seule
unité
fut
perdue
:
la
frégate
à
voiles
Sémillante
qui
par
mauvais
temps
sombra
au
sud
de
la
Corse
sur
l'îlot
Lavezzi
avec
692
hommes
à
bord.
L'autre
tâche
des
navires
alliés
fut
comme
nous
l'avons
vu
l'attaque
d'ouvrages
fortifiés.
Or
les
flottes
de
ce
temps
n'étaient
pas
préparées
pour
accomplir
des
missions
de
transport
de
cette
importance
sur
de
telles
distances,
et
les
premiers
bombardements
de
Sébastopol
mirent
en
évidence
l'inefficacité
et
la
vulnérabilité
des
vaisseaux
face
aux
canons
qui
armaient
la
forteresse,
d'où
le
recours
aux
navires
cuirassés.
Enfin
cette
guerre
établit
de
façon
définitive
la
supériorité
des
vapeurs
sur
les
voiliers.
Face
à
une
Russie
dont
la
modernisation
était
loin
d'être
comparable
à
celle
des
autres
nations
occidentales,
c'est
essentiellement
grâce
à
leur
puissance
économique
et
industrielle
que
la
France
et
de
la
Grande
Bretagne
purent
sortir
victorieuses
de
ce
conflit.
Elles
purent
ainsi
à
la
fois
assumer
la
mise
en
place
et
la
logistique
du
corps
expéditionnaire
qui
fut
envoyé
en
Crimée
et
remédier
aux
carences
de
leurs
flottes
en
construisant
un
nombre
suffisant
de
bâtiments
de
siège
(canonnières,
bombardes,
et
batteries
flottantes
cuirassées),
ainsi
que
de
nouveaux
vaisseaux
à
hélice.
De
plus
la
France,
dont
la
marine
marchande
s'était
révélée
insuffisante
pour
assurer
l'acheminement
de
ses
troupes,
se
montra
capable
d'adjoindre
à
sa
flotte
un
certain
nombre de transports à vapeur.
Une
conséquence
inattendue
du
traité
de
Paris
fut
l'amorce
d'un
rapprochement
entre
Paris
et
Saint
Petersbourg.
Au
cours
des
discussions
des
relations
amicales
s'étaient
en
effet
établies
entre
les
représentants
de
ces
deux
pays,
et
elles
se
poursuivirent
par
la
suite.
La
rencontre
des
deux
empereurs
en
septembre
1857
scella
le
début
d'une
entente
dont
la
Grande
Bretagne
ne
tarda
pas
à
prendre
ombrage.
Mais
ce
rapprochement
fut
de
courte
durée.
En
effet
lorsqu'en
1863
la
Pologne
s'insurgea
pour
réclamer
son
indépendance,
Napoléon
III,
fidèle
à
ses
idées
concernant
l'autodétermination
des
peuples,
tenta
(vainement
d'ailleurs)
d'intervenir
en
sa
faveur,
ce
que
ne
put
supporter
le
tsar
qui
mit
alors un terme aux relations cordiales qui s'étaient établies entre la France et la Russie.
Jean Marpeaux